Né le 29 octobre 1954 au Gabon, Kassa incarne la figure de l'artiste à la croisée des mondes. Exposant régulier à l'UNESCO, il quitte le Gabon pour la première fois en 1975, passionné d'histoire et de philosophie, il quitte le Gabon pour le Sénégal afin de poursuivre des études de sociologie à Dakar, où il s'immerge dans l'effervescence intellectuelle de la capitale sénégalaise. Une rencontre marquante avec Jacques Césaire, journaliste et fils du poète Aimé Césaire, l'oriente vers le journalisme. Cette nouvelle voie le conduit à Paris, où il intègre l'École Supérieure de Journalisme et collabore avec des médias tels que Transafrique et Francophonie Magazine de 1988 à 1993.
En 1980, Kassa s'installe en France. Il épouse Françoise et devient père d'une fille, tissant les premiers fils d'un métissage culturel et familial qui marquera sa vie comme son œuvre. Il n'est pas retourné au Gabon depuis plus de quarante ans. C'est le moteur de tout ce que l'on voit dans son travail — les tons terreux qui reviennent dans son œuvre, terre de Sienne brûlée, ocre, le rouge de la latérite, sont les couleurs d'une patrie qui n'existe plus que dans la mémoire. Il porte le Gabon dans son corps, mais il ne peut pas le toucher.
En 1994, à quarante ans, une crise de conscience le pousse à rompre avec le journalisme. Le langage avait été son outil ; désormais il était insuffisant. Ce qu'il avait besoin de dire ne pouvait pas s'écrire. Il fallait le rendre visible. C'est à ce moment charnière que la peinture s'impose à lui, révélée par le regard bienveillant de Françoise qui, le voyant peindre, l'encourage à suivre cette voie.
Son prénom traditionnel, « Kassa », signifie « gratter » en bapounou, dialecte gabonais — gratter comme on le fait quand quelque chose démange, irrite, vous pousse hors de votre zone de confort, vous forçant à chercher, à savoir, à comprendre. L'empâtement épais, les surfaces raclées, les couches accumulées puis excavées — ce sont la manifestation physique de la signification de son nom.
Installé à Poitiers, Kassa se consacre depuis trente ans à la peinture. Les femmes sont ses ancres et ses initiatrices. Françoise, qui a vu le peintre en lui avant qu'il ne le voie lui-même. Maïmouna, autre femme totem dont la présence a ouvert de nouveaux chemins. Elles apparaissent non pas comme sujets mais comme forces — compagnes spirituelles. La lèvre rouge qui persiste à travers ses monochromes est leur totem : voix, sensualité, origine, insistance. Le principe féminin qui survit quand tout le reste est dépouillé.
Les grilles qui fragmentent ses figures évoquent les bureaucraties coloniales, les papiers d'immigration, chaque institution qui impose une forme au soi — mais elles fournissent aussi l'échafaudage dans lequel l'identité se construit. Les visages sont multipliés, coupés, réassemblés — non pas brisés, mais élargis. Chaque peinture est un acte de reconstruction, et la reconstruction n'est pas la même chose que la récupération. C'est créer quelque chose qui n'existait pas avant. La fragmentation n'est pas la mort ; c'est la multiplication.
Ces peintures ne crient pas. Elles résonnent. Elles n'expliquent pas. Elles insistent. Elles ne finissent pas. Elles ouvrent.
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